Elle dormait.
Moi, je ne dormais plus.
Je me sentais religieux. Je me sentais habité...
J'avais envie de rendre un culte, mais pas à Morphée. J'eusse voulu une autre divinité. Vu mon désir, en effet, Eros me semblait plus approprié.
Elle dormait, du moins, c'est ce que je croyais.
Je me suis approché de son dos, pour me serrer encore plus fort, juste pour savourer le plaisir d'être contre son corps nu.
J'étais tout contre elle, un amant alerte contre sa maîtresse assoupie. Paradoxe nocturne que l'amour pourtant interdit.
Soudain, j'ai senti une de ses mains, prendre mon désir et le guider en elle...
N'était-ce donc pas moi qui dormais et qui rêvais ?
Elle était brûlante, humide, elle m'attendait.
Sans un mot, nous avons commencé notre ronde, sans tendresse, avec fureur, pris par une vigueur animale.
Par le vecteur des élans, elle s'est retrouvée rapidement, perpendiculaire à moi. Nous n'en eûmes cure. Euclide était oublié. Qu'eût-il pu faire devant la force de nos élans et ma main qui agrippait son flanc ? Dans cette tempête, il me fallait bien m'accrocher. J'étais à la fois le radeau et la vague.
Soudain, elle m'a rejeté comme un fétu de paille.
Je me suis retrouvé sur le flanc, comme une bête blessée, mugissant de la douleur causée...
Elle s'est agenouillée. Je compris le message. Je l'ai investie, ainsi, avec une force nouvelle.
Toujours aucun mot, seul l'écho de nos élans.
De plus en plus vite, de plus en plus fort, le lit bougeait avec nous, les draps étaient repoussés...
Tout à coup, elle m'a demandé, elle a exigé, puis, elle a supplié que je jouisse en elle au même-moment qu'elle.
Parfois, j'avoue, je sais être un bon génie. Son voeu fut accordé...
Notre pyramide s'est alors écroulée, elle s'est retournée sur le flanc, comme une bête blessée, à son tour, nos souffles encore hachés.
Nos épanchements intimes avaient suscité des flux qui s'écoulaient libres, encore vivants, tachant les draps après avoir souillé nos deux corps où ils étaient nés.
Ma main reposait sur son ventre, elle tremblait, j'avais chaud.
Nous nous sommes endormis de suite, dans les vapeurs d'Eros, qui toujours, une fois consommées, appellent l'éther de Morphée...
Au matin blême, une pensée troublante, une charmante interrogation... Avais-je rêvé ?
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8 commentaires:
Pourquoi fermer les yeux ?
Pourquoi prier les dieux ?
Pourquoi se dire que la beauté
ne peut être que rêvée ?
Charmante interrogation en effet
D'autant que les draps ont prouvé
que le marchand de sable a oublié
dans votre quartier de venir semer..
Si c'est un rêve, il fut bien agréable... Rêvez encore, et racontez-nous...
@ Multi-sourires : Je me suis toujours méfié du sable, qui comme le rêve ment. Mais, comme vous, amie, je crois aux draps qui disent la passion...
@ Ange-solaire : Quoi de plus normal que dans un lieu consacré à Eros de rencontrer un ange ?
A un ange, je peux l'avouer, ce ne fut pas un rêve...
Bienvenue dans ces murs.
Rien ne vaut une trace, aussi infime soit elle, pour nous rappeler la realité du reve...
@ Perséphone : Car la trace, c'est la réalité passée...
Et l'archéologue alors tue le... chasseur.
chasseur, piste les traces que sa proie laisse derriere elle, tel un petit poucet.
@ Perspéphone : j'aime cette idée de traquer les pistes, les traces, les occurrences, les signes et que sais-je encore... Tous disent et expriment l'étreinte accomplie, et les désirs réunis, eux qui sont trop souvent orphelins...
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