ll pleuvait hier soir sur Paris... Une pluie fine, doucereuse, qui dessinait des filaments et des étoiles dans les cheveux longs des femmes.
Je me suis laissé bercer par ces filaments, nouvelle toile, aux mille Pénélope. J'ai éteint mes yeux, et laissé mon sens olfactif s'emparer de ma raison. Commencer par où on n'a jamais commencé, comme écrivait Baudrillard.
Celle-là, a une odeur fade, jupe courte, collants opaques, bottes quelconques, parfum à la mode, sans attraits aucuns. Oublions là. Une odeur de bazar, d'estaminet, de discothèque, tout y est fallacieux, controuvé, sans individualité.
Celle-ci, est assise, sur des talons hauts, vernis, dont le noir lance des reflets et des aiguilles dans le coeur des hommes sensibles. Ses jambes sont entrouvertes, juste assez pour que le curieux ou l'obsédé voit qu'elle ne porte pas de collants. Elle se grise des regards masculins, s'en repaît. Elle sent la sueur, désagréable sensation, cette obstination de séduire à tout prix, toujours et encore, de chercher dans le regard des hommes l'antique phrase du miroir "dis-moi que je suis belle, dis-moi..." Même son odeur dit le mensonge et l'artifice.
Une autre odeur, plus jeune, plus forte, étrangère, africaine, là où les cornes de gazelle sont des pâtisseries qui éveillent le désir. Elle dispense une odeur puissante, musquée, comme un parfum orageux. Elle regarde par en-dessous, timidement, comme par accident, et son odeur danse comme un fantôme... Celle-là, l'homme qui l'aimera aura beaucoup de chance.
Un nuage de Chanel n°5, une odeur ancienne, dépassée, où l'âge dispute à la fragance, les volutes qui s'échappent de son lourd manteau sont comme les rides qui déchirent son visage. Un cri de détresse, un appel ultime, un souhait qui lentement meurt de ne pas être exaucé. L'odeur d'un tombeau qui lentement se renferme, vieux parfum dans un vieux flacon...
Un souffle de Guerlain, et la chanson de Gainsbourg souligne les vapeurs répandues, comme une invitation. Mais laquelle choisir ? Cette saveur a mille voix, "Je t'aime moi non plus!", "sex-shop", "requiem pour un con", "sex on the beach"... Un parfum juke-box, mais on entend aussi dans ce parfum, on sent aussi et surtout "que l'amour physique est sans issue..."
Et celui-là, celui-là, oui, celui-ci, qui fait tourner la tête et le nez, qui l'envahit, qui le submerge, qui le noie pour mieux le libérer et le faire renaître, ce parfum à nul autre pareil, ce parfum, terrien, insulaire, azuréen et âcre comme une insulte, un parfum qui prend, dont on s'éprend, celui du désir. Il est caméléon ce parfum, se cache derrière tant de vagues qu'il en devient incertain. ô compagnon infidèle; quand te sentirais-je de nouveau ? Quand feras-tu de moi ton hilote ou ton zélote ? Juste une fois, encore une fois, une véritable fois, une fois encore, rien qu'une fois, pour sentir, pour se ressentir ?
Et tant d'autres encore, tant de parfums, d'odeurs, qui tous disent que la femme est un parfum...
Parfum que bien des hommes ne posséderont jamais.
On peut être aussi un témoin olfactif...
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8 commentaires:
Vous touchez un de mes points faibles
ou forts, selon jours ou semaines
car mon nez a cette faculté
d'être sensible et de me parler
J'ai ressenti avec vous ces odeurs
ces fragrances poivrées ou douceur
et je conçois que l'aura exprime
une odeur évidente et indescriptible
Que ça sent bon chez vous!
L'odeur du désir , souvent...
L'odeur de l'envie , toujours.
@ Multi-sourires : le nez parle oui, comme celui d'un elfe qui sent venir le Troll ou le Gobelin ;-) Le nez parle car l'odeur est langage, elle dit beaucoup. En Corse, chez moi, on dit, on aime à dire que le parfum de soi est le porte-parole de son âme...
@ Angie : Cela sent bon dans mes mots, oui, c'est vrai, mais cela ne reste que des odeurs. Et le parfum, parfois, comme sous un vent mauvais, devient le sel qui creuse la plaie...
Et bien, et moi qui ne me parfume jamais... !
Tout est parfumé aujourd'hui, les shampooings, les savons, les huiles, les laits, les crèmes... tous ces mélanges...
Y ajouter un parfum pour recouvrir le tout... je ne sais pas... alors je sens moi et voilà. ;-)
@ Lysis : Tout vous est dans cette phrase, on le sent bien ;-)
Vous êtes très acéré avec les femmes...n'auriez-vous un peu de compassion pour celles qui se cherchent dans le regard des autres, pour celles qui voient le temps leur filer entre les doigts...Mais peut être auriez-vous davantage de compassion pour une mère qui sert son enfant contre elle pour l'endormir...
Comme une ode aux parfums. Comment résisterais-je aux rêves que vos mots suscitent. Il suffit de fermer les yeux et quand les fragrances ont la grâce de nous parler, que de belles histoires elles racontent à celui qui sait écouter.
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