mardi 19 août 2008

Préhistoire de mon désir

Tout désir a une histoire.

Nous avons tous des histoires de ces premiers désirs qui nous firent homme/femme.

Mais et la préhistoire de notre désir ? Cette histoire avant l'histoire, avant les premières émotions et les folles sensations, qui l'a écrite, qui la dira ? Pourquoi la tait-on ?

Quelle fut la préhistoire de mes désirs ?

C'est une préhistoire, stricto sensu, une histoire avant que je ne sache même écrire.

C'était le temps de la maternelle, j'étais blond comme les blés de nos meilleures terres. Nous étions une trentaine de garnements, mélangés, il y avait des filles, il y avait des garçons. Des crayons, des feuilles blanches et des récréations qui duraient, sous ce ciel bleu et la mer dansait au loin. Elle dansait, car elle savait que nous serions bientôt siens.

Il faisait toujours chaud, toujours beau, l'hiver chez nous est inconnu.

Ma maîtresse était blonde comme les blés. Elle était grande, mais à mon âge, tous les adultes étaient vus comme ce qu'ils étaient, des géants. Elle avait un drôle d'accent, ne prononçait pas les mots comme nous. On disait qu'elle venait du continent, de là-bas, derrière la plage, derrière la mer même, à quatre ans, c'était bien inquiétant cette origine. Et un peu mystérieux aussi.

Ma maîtresse était belle et blonde, ses yeux étaient bleus. Elle avait toujours des jupes sages et larges. Et son corsage était ouvert sur des monticules dont j'ignorais toute géographie.

Je la regardais captivé, par cette hauteur de vues, par ce regard bleuté comme la mer, et par ses jambes. Je regardais ses jambes, qu'elle avait parfois voilées, par un voile diaphane, entre gris chiné et transparence affichée.

De ce jour-là, de ces jours, j'ai aimé les femmes dont les jambes étaient gainées.

Elle est partie, emportée par un cancer, l'année scolaire s'est achevée avec un homme barbu.

Je repense encore à elle, parfois, ma première image de femme, brouillée certes par le poids des années accumulées dans mon histoire.

Je repense à cette préhistoire, à la fois où j'ai effleuré ces voiles sur ses jambes, comme je volais la confiture dans les pots de grand-mère.

J'en ressens encore la douleur et la douceur.

Je n'ai plus jamais ressenti cette sensation là, plus jamais.

Mais pourtant, je caresse les voiles que les femmes offrent à mes mains et à mes doigts, et parfois à mes lèvres curieuses et agitées, avec la même fébrilité. Sans doute dans ces moments-là, confusément, je rends un hommage à ce premier contact.

C'est une histoire digne de la préhistoire... L'homme qui a ressenti le premier la chaleur du premier feu a dû se sentir ainsi, j'imagine. Le premier contact et la différence du second...

C'est ma préhistoire, la préhistoire de mon désir...

3 commentaires:

Anonyme a dit…

a désir guide t il les hommes et les femmes?

heureux les hommes et femmes sans désir?

Savinien a dit…

Sans désir, ils ne sont pas, ils ne sont rien.

Et j'aime cette idée là, de voir la vie comme une quête de désirs, chaque âge a les siens. Collectionneur de désirs, ce serait une belle épitaphe, non ?

Henri-Etoile a dit…

Pour envisager des découvertes, ensemble de cete veine là.......

et de bien plus riches encore...

je vous dis

à Bientôt,